Ovidie signe ici son livre le plus personnel
La chair est triste hélas est le premier opus de la collection « Fauteuse
de trouble », dirigée par Vanessa Springora pour les éditions Julliard.
Cette collection est consacrée à des textes articulant les thématiques
de la sexualité et de la révolte, de l’intime et de l’émancipation.
Ovidie inaugure cette collection avec un récit intime et pertinent-.
Militante du mouvement pro-sexe dans les années 1990, l’autrice et réalisatrice Ovidie, figure féministe incontournable de notre époque, livre le récit passionnant de la trajectoire qui l’a conduite, depuis quatre ans, à sortir de la sexualité
J’ai entamé la lecture de ce livre avec prudence. Tout le monde connait Ovidie pour ses expériences sexuelles et pornographiques. Donc, pour moi, Ovidie ça pique un peu. Aucun à priori, juste la crainte de me sentir dépassée par son propos.
Son livre m’a bouleversée.
Comment la société a-t-elle pu évoluer depuis les années 70 et la revendication de l’amour libre, pour en arriver à l’injonction de la séduction.?
Nous revendiquions le droit au plaisir.
Nous rêvions d’une société sexuellement épanouie, sans violence ni contrainte, avec la secrète illusion de balayer les perversions et les violences sexuelles.
Quelle naïveté mais quelle belle utopie.!
En lisant le récit de Ovidie, qui est une grande spécialiste de l’intime et du rapport au corps, j’étais consternée de découvrir que les contraintes existent toujours mais elles ont changé de propos. Là, nous sommes face à l’injonction de la séduction et de la libération sexuelle. Nous avons passé du tabou de la sexualité libre à l’obligation d’être partante pour toutes les pratiques tout le temps.
Le désir et le plaisir de la femme sont toujours relégués au second plan.
Ce livre est la confession intime d’une femme qui, aux abords de la
quarantaine, a décidé, de ne plus avoir de relations sexuelles. Au fil des pages de ce récit auto-fictionnel, écrit dans un souffle, et dont chaque ligne porte le poids d’une colère longtemps contenue, elle raconte ce jour où elle n’a plus été capable de partager son lit avec qui que ce soit. Entre lassitude face à la répétition des mêmes scénarios érotiques et refus général de céder aux injonctions faites aux femmes, la narratrice s’octroie alors le droit de se tenir désormais éloignée de la sexualité. Avec une méticulosité scientifique, elle consigne une à une les observations tirées de cette expérience d’abstinence sexuelle, inédite pour elle. Une étape qui l’amène à revisiter certaines anecdotes marquantes de son existence, bouleversant le regard qu’elle porte aujourd’hui sur son parcours de femme, mais aussi sur les relations sociales formatées par une culture hypersexualisée.
Interrogeant les raisons de son choix, qu’elles soient intimes ou politiques,
et les conséquences de cette « diète » sur sa vie privée et publique, ce récit
est le fruit d’une réflexion menée durant quatre ans, tantôt pétrie de doutes
et de souffrance, tantôt apaisée et libératrice. Un texte sans concession,
toujours sincère et poignant, qui n’épargne ni les hommes ni les femmes,
ni l’autrice elle-même, et ne laissera, à coup sûr, personne indifférent.